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Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions

 

Le 10 mai, une cérémonie commémorant la journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions s’est tenue à la préfecture du Lot.

Les élèves du lycée Gaston Monnerville de Cahors ont lu le discours prononcé par Gaston Monnerville à la Sorbonne, le 27 avril 1948, à l’occasion du centenaire de l’abolition de l’esclavage en France.

Il y a cent ans !
L’explosion de 1848 secoua le monde entier.
Jamais, à aucun moment de son Histoire, la France n’assista à pareille profusion d’idées.
Jamais, la France n’avait attiré à ce point l’attention des peuples.
Des réalisations admirables de la Seconde République, il est resté peu de choses à la Vérité… Mais deux conquêtes essentielles demeurent : le suffrage universel, si imparfait qu’il ait été ; et l’abolition de l’esclavage.

Des deux, la conquête définitive, jamais remise en question, fut bien l’abolition de l’esclavage…
Février 1848, on est comme une nouvelle éruption. Sans doute fut-elle préparée par cette lente gestation qui précède toujours les ébranlements définitifs. Depuis 1794, la pression des événements et des hommes avait imposé aux régimes successifs des adoucissements en faveur des esclaves ; mais avec une lenteur qui témoigne de la résistance inhérente à l’ancienneté des institutions. Le malheureux peuple d’esclaves, tout comme le peuple misérable des travailleurs métropolitains de l’époque, ne pouvait accepter de trouver "dans les qualifications changeantes d’une infortune qui ne changeait pas "des raisons suffisantes d’espérance. Cependant, l’évolution était en marche, irrésistiblement.
Des hommes qui ont lutté pour la hâter… : Victor SCHOELCHER.

Le 4 Mars 1848, au cours d’une conversation pathétique, il convainc Arago de la nécessité de signer le décret désormais fameux qui proclame "Nulle terre française ne peut plus porter d’esclaves"… Et, en deux mois, le 2 Mai exactement, toutes les questions soulevées par l’émancipation sont étudiées et réglées. Œuvre admirable que ces décrets du 27 avril, tous placés au niveau des plus hauts principes républicains. Chacun de ces décrets est précédé d’un exposé des motifs, d’une élévation et d’une noblesse qui émeuvent. Chacun d’eux rappelle l’une des plus précieuses conquêtes spirituelles ou morales de l’humanité.

"La Commission, y est-il dit, n’avait point à discuter le principe de l’affranchissement général ; il est intimement lié au principe même de la République : il se pose, il ne se discute plus aujourd’hui...

La République ne … mentirait à sa devise, si elle souffrait que l’esclavage souille plus longtemps un seul point du territoire où flotte son drapeau"…

Et il conclut par cette proclamation qui atteint au plus haut sommet de la solidarité humaine : "La République n’entend plus faire de distinction dans la famille humaine. Elle ne croit pas qu’il suffise, - pour se glorifier d’être un peuple libre -, de passer sous silence toute une classe d’hommes tenue hors du droit commun de l’humanité.

Elle a pris au sérieux son principe ; elle répare envers ces malheureux le crime qui les enleva jadis à leurs parents, à leur pays natal, en leur donnant pour patrie la France, et pour héritage tous les droits du citoyen français. Par là, elle témoigne assez hautement qu’elle n’exclut personne de son éternelle devise : « Liberté - Egalité - Fraternité ».

Telle est l’oeuvre.

Le message SCHOELCHER, la France se l’adressait à elle-même.
L’esclavage des Noirs n’était qu’une des formes de la servitude humaine. Des formes de servitudes ont disparu ; d’autres sont nées qui pèsent lourdement sur l’humanité. Tant il est vrai que le progrès lui-même crée ses servitudes.

Victor SCHOELCHER. … nous montre qu’une volonté tenace, mise au service de la raison et d’un haut idéal, est susceptible de changer la face du monde.

Alors, à ceux qui douteraient encore, à ceux qui s’attarderaient à s’interroger sur l’opportunité du grand geste que fut l’émancipation des esclaves et leur appel à la citoyenneté, … nous qui avons perçu la résonance profonde qu’il a eue dans l’esprit de tous les citoyens du monde, nous crierons de toute notre foi, du plus profond de notre être reconnaissant :
"Oui, Victor SCHOELCHER avait raison".

Gaston MONNERVILLE

Discours de Monsieur le Préfet
À l’occasion de la journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leur abolition, le 10 mai 2021

Il y a 20 ans, jour pour jour, le Sénat adoptait à l’unanimité la loi reconnaissant la traite et l’esclavage en tant que crime contre l’humanité.

Un crime contre l’humanité.

Déjà en 1794, le législateur avait qualifié l’esclavage de « crime de lèse-humanité ». La loi de 2001 poursuit ce mouvement. Elle inscrit la traite et l’esclavage parmi les grands crimes de l’Histoire, ceux qui, dans les mots d’André Frossard, « nient l’humanité de la victime, en clair et sans appel ».

Elle reconnaît l’horreur et la barbarie de l’esclavage qui, pendant plus de 400 ans, a marqué notre pays. Elle consacre une journée nationale des mémoires que nous commémorons le 10 mai, pour honorer le souvenir des victimes de l’esclavage et rappeler ceux qui firent de l’abolition leur combat.

Par deux fois, la France Républicaine abolit l’esclavage. En 1794, d’abord, éclairée par l’esprit des Lumières et la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen, la Convention votait une première abolition qui ne devait durer cependant que huit ans.

En 1848 ensuite, sous l’impulsion de Victor Schoelcher, le gouvernement provisoire abolissait définitivement l’esclavage par ces mots :
« considérant que l’esclavage est un attentat contre la dignité humaine, qu’en détruisant le libre arbitre de l’homme, il supprime le principe naturel du droit et du devoir ; qu’il est une violation flagrante du dogme républicain : Liberté, Égalité, Fraternité. »

Aujourd’hui, nous nous souvenons de cette Histoire, de notre passé. De cet héritage qui marque notre géographie, des Antilles aux Mascareignes, notre langue, parlée sur tous les continents, notre culture, de Césaire à Senghor.

C’est par ce devoir de mémoire que nous faisons Nation, par cette mémoire que se renouvelle notre cohésion nationale.

Ici, dans Lot, la mémoire de l’esclavage résonne d’une façon particulière, rappelée par la figure de Gaston Monnerville dont nous venons d’écouter les mots prononcés à l’occasion du centenaire de l’abolition.

Petit-fils d’esclaves, Résistant, Président du Conseil général du Lot, Président du Conseil de la République puis du Sénat, Gaston Monnerville incarne cet héritage, marqué par l’esclavage et acteur de la reconstruction de la France et de la défense de ses institutions.

En cette journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leur abolition, nous nous souvenons de notre Histoire, nous n’oublions pas ce que fut l’esclavage et nous rappelons ce qui, à l’image de Monnerville, nous unit dans la construction d’un destin commun.

 
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